Archives de catégorie : Humeur

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Keywords – technique mixte

Des mots, des mots, toujours des maux… J’ai repris mes pinceaux et mes couleurs pour des mots collés, des mots croisés, les mots des autres glanés dans des journaux. Parce qu’il me faut montrer la force du verbe face à l’obscurantisme, à l’ignorance et aux fausses croyances.

Gunnar Knechtel Photography

Certains artistes sont bluffants. Je viens de découvrir l’oeuvre saisissante de David Bowen, Telepresent Water 

Il s’agit d’une sculpture cinétique dont le mouvement est animé par les données d’une Bouée située dans l’Océan Pacifique. Les capteurs transmettent en temps réel les oscillations de la surface et rendent tangible les mouvements de la mer.

Telepresent Water en video

Et j’en suis scotchée.

site officiel de l’oeuvre

Actuellement visible à l’Exposition 123 Data de la Fondation EDF.

Cahors_pont_valentre_pano (1)Dans la nouvelle intitulée « Rencontre e-nattendue » de Point à la ligne, je cite la légende du Pont Valentré, l’emblème de Cahors, la ville de mon enfance. Connaissez-vous ce pont au petit diable de pierre ? Quand j’étais collégienne puis lycéenne, je le traversais quatre fois par jour en voiture ou cyclomoteur. Il est piétonnier aujourd’hui.

Son histoire, sa légende : Le pont Valentré à Cahors

 

evaLe scénario de ce nouveau film de Benoit Jacquot a des similitudes avec celui de mon roman en cours d’écriture : l’écrivain en panne d’inspiration qui cherche à retranscrire ce qu’il vit dans ses écrits et le désir à sens unique. Mais quelle déconvenue ! Je suis passée outre les critiques tièdes pour le plaisir de retrouver Isabelle Huppert et Gaspard Ulliel. Mais je me suis ennuyée. Il n’y a aucune tension, ou si peu. Un thriller sexuel parait-il, mais sans sexe ni meurtre, seulement indirectement ou par suggestion.

Un seul mot : décevant.

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Les cyprès de Vincent Van Gogh

Il faut être un peu bête, dit Akira Kumo à Virginie Latour, et l’être avec une sorte d’obstination irraisonnée, pour s’intéresser aux nuages. Pour la plupart des personnes de bon sens, les nuages sont là. Et puis, c’est tout. Que dire d’autre ? Ils font partie du décor. Il n’y a pas de raison de les considérer avec davantage d’attention. Pour la plupart des gens, il n’y a rien d’étonnant dans les nuages, il n’y a rien en attendre ; sinon de l’eau, sous différentes formes. Les hommes ne regardent les nuages que pour guetter la pluie, soit qu’ils l’attendent avec une impatience fébrile, soit qu’ils la redoutent comme une catastrophe. Les progrès de la civilisation occidentale les ont encore détournés davantage de l’observation du ciel : dans cette partie du monde les hommes consultent leur poste de radio ou de télévision pour savoir comment s’habiller. En de rares occasions, ces hommes sont touchés par la beauté absolue des nuages. C’est par exemple quand le ciel est bleu et que, allongés dans l’herbe d’un parc, ils ont fini de pique-niquer ; ils se sont renversés en arrière ; ils regardent les nuages passer, et fugitivement les admirent, en digérant. Ils ne pensent à rien. Et ils n’ont pas forcément tort. Une forme de bêtise habite toute pensée ; et donc, le désir de comprendre les nuages.

Extrait de La théorie des nuages de Stéphane Audeguy

Chacun connaît ces moments rares et un peu magiques où des éléments convergent faisant jaillir un thème ou une idée comme une évidence. Ce week-end, la beauté insaisissable des nuages étaient dans mon esprit, que je lise, avec ce beau roman de Stéphane Audeguy, que je regarde au loin sur la belle vallée de l’Oise ou que j’admire l’exposition sur l’impressionnisme au Château d’Auvers-sur-Oise. Partout des nuages à l’humeur changeante, aux mouvements imprévisibles. Partout.

poeme

Lu sur le site Short Edition* – un site sur lequel j’ai posté des récits courts -, un poème de Lamba :

De la difficulté d’écrire et « Rose »

Ce jour-là j’ai pris le mot « rose » (Pris où ? Dans quoi ? Respiré ? Inspiré ?)
L’ai posé au bord d’une page (21×27, blanche et intimidante, bien sûr)
Et ai attendu (Quoi ? Comment ? Pourquoi ? Éventuellement qui ?)

La surprise l’imprévu l’impromptu le bon mot le grand mot le mot juste
Celui qui fait tilt qui fuse qui ruse et permet de rebondir
Le délivreur le sauveteur le bel enjôleur
À suivre sans attendre sans comprendre
En se laissant aller à la phrase déliée de mot en mot
L’un qui appelle l’autre
Et l’autre, interpellé, qui lui répond très bien
En scandant, magicien, le miracle d’un texte.

Ce jour-là j’ai pris le mot « rose »…
Et il ne s’est rien passé
Qui puisse vous intéresser :
Sous ma plume il s’est dilué, a blêmi, s’est évanoui ;
Alors j’en ai appelé à la fleur
L’ai effeuillée jusqu’à son cœur
Sur le papier ne sont restés
Dans le parfum imaginé
Que quelques mots à l’eau de rose…

Eh oui, parfois les mots viennent, d’autres fois ils s’y refusent… Ils n’en font qu’à leur tête !

* : cf Article précédent sur Short Edition

sourire
image : site trans4mind.fr

20 sourires par jour, ce serait la moyenne française. Et 23 dans le sud-ouest !

C’est ce que j’ai lu cette semaine dans un magazine dont je ne retrouve plus la trace.

On sourit peut-être plus dans le sud-ouest parce que la vie y est plus douce qu’ailleurs ou peut-être parce que c’est ainsi, question de culture.

Sourire souvent, un peu tout le temps, avec ou sans vraie raison, c’est ce que fait Natasha, l’héroïne de Les jumelles, mon premier roman, jamais abouti, dont j’ai décidé de reprendre l’écriture quand je serai venue à bout de Le voisin. Or Natasha est originaire d’une petite ville imaginaire de Dordogne que j’ai baptisée Floissac. Hasard ou pas ?

À l’atelieroblique-strategies-1 d’écriture, Marianne nous a présenté  Oblique Strategies, ce jeu de cartes conçu par Brian Eno et Peter Schmidt en 1975 pour contourner un blocage créatif. Elle nous a demandé de piocher des cartes et de nous en inspirer pour écrire un passage de notre roman.

J’ai tiré 4 cartes. « Que ferait ton meilleur ami ? » me convenait assez bien, mais deux des trois autres cartes concernant le réel et l’irréel, j’ai préféré les conserver et échanger mes deux autres cartes. Étrangement,  les deux nouvelles cartes qui se sont présentées relevaient du même registre.

Alors, c’est décidé, il va y avoir du rêve, du cauchemar, de l’illusion dans Le voisin et cela me convient très bien ainsi !

À noter, les cartes sont téléchargeables gratuitement : stratégies obliques en français, vous verrez, c’est bluffant !

photo couv.jpgMon amie Lydie a instantanément accepté de réaliser la photo de couverture de Point à la ligne. Je tenais tout particulièrement à ce que ce soit elle parce qu’elle est talentueuse évidemment et qu’une couverture, c’est le premier contact avec le lecteur potentiel. Mais Lydie est aussi l’une de ceux qui m’ont encouragée à écrire et sans lesquels j’aurais peut-être abandonné. Enfin et surtout, c’est une compagne sur la route de nos envies. Elle voulait photographier tandis que je souhaitais écrire et nous sommes en train d’y parvenir.

Choisir le sujet à photographier n’a pas été aisé. Le fil rouge du recueil étant les écrits, des photos de lettres se sont imposées mais jugées un sujet trop bateau. Lydie a photographié sa mère en train de lire. La photo était superbement émouvante mais elle ne me semblait pas représenter l’ensemble des nouvelles.

Alors nous sommes revenues à notre idée première et je lui ai confié quelques documents anciens, souvenirs de famille. Alors Lydie a eu cette merveilleuse idée : les placer dans une boîte ouverte comme autant de souvenirs resurgis, de questionnements remontés à la surface, de dérobades mises à jour. Au premier plan, elle a positionné une lettre joliment illustrée, adressée à ma grand-mère Renée par un ami de la famille, Paul-Eugène Mesplès, un peintre renommé en son temps. Malicieuse, elle a également glissé dans la boîte la photo de son papa (Je ne me permets, Lydie, cette confidence que parce que tu l’as toi-même dévoilée lors de notre soirée le Goût des livres) pour que « ces deux êtres chers aujourd’hui disparus veillent sur nous comme deux anges. »

Cette photo, désormais en couverture de Point à la ligne, est ainsi une part de nous deux et c’est ce qui rend cette aventure créative encore plus magique.

Ne manquez pas de (re)découvrir les émouvantes photos de Lydie Hacquet, photographe de l’instant et de l’incongru : Galerie photos Histoire d’L

 

Detal-marche_therrière son étal coloré, la vendeuse enlève une mitaine pour mieux saisir les carottes, les pèse et resserre son écharpe autour de son cou juste après m’avoir tendu le sachet brun bedonnant.

« Il fait pas chaud ce matin, hein ! » commenté-je, glacée moi aussi par le vent froid qui bat le marché en cette matinée dominicale de février. La température clémente de la veille nous a fait croire à l’arrivée du printemps et voilà que l’hiver réagit, trop fier pour se laisser si facilement supplanter par son fougueux cousin. « Je suis gelée » avoue-t-elle.

Son patron s’avance vers elle, un quinqua bien conservé (le régime 5 fruits et légumes par jour fonctionnerait donc vraiment ?), dos droit et torse bombé, col ouvert et mains nues. « Vous n’avez pas froid, vous ? » lui demandé-je tout en triant difficilement du bout de mes doigts gantés les bonnes pièces dans mon porte-monnaie.

– Non, je n’ai pas froid ! me répond-il avec une assurance un peu brutale.

– Il n’a jamais froid, précise la vendeuse en empochant mon argent.

– C’est vrai, je n’ai jamais froid, affirme t-il à son attention plus qu’à la mienne.

– Vous avez un secret ? plaisanté-je.

Je m’attends à une réponse passe-partout qui sonnera la fin de notre échange, mais l’homme se penche vers moi et me dit en baissant la voix : « Viens, je t’explique. » Et il m’entraîne à l’autre bout de l’étal, loin de la vendeuse et des autres chalands.

Pendant que nous parcourons ces quelques mètres, je me demande quel peut bien être le secret de cet homme. Est-il atteint d’une maladie hormonale rare ? Pratique-t-il l’hypnose ? Porte-t-il un Damart 3.0 ? Et quand il s’arrête devant les choux-fleurs, j’ai le cou tendu, le palpitant sur « pause » et l’oreille grande ouverte prête à capturer la réponse.

« Je t’explique : bien sûr que j’ai froid moi aussi, mais je ne l’avoue jamais. » Je le regarde avec des yeux aussi inexpressifs que ceux d’une tortue. « Ben oui, sinon ils auront tous encore plus froid. Tu comprends ? »