Tout passe

Tout passe

Tout passe, les années, les souffrances, les problèmes, l’enfance, les souvenirs, les rêves, les douleurs, la vie… J’ignore ce qu’a voulu dire cet artiste africain sur cette peinture murale mais, oui, tout passe, comme chaque Homme sur cette terre. Dieu merci, rien ni personne ne résiste au temps.

Tout passe
Panneau-photo exposé sur la place devant le RER de Vincennes (Val-de-Marne) dans le cadre du Festival L’Afrique en marche. Avril 2022
Jeune fille en pleurs

La jeune fille triste

Elle est assise sur le rebord de ciment devant la porte du garage. Je l’observe depuis ma fenêtre.

J’ai l’habitude de regarder les jeunes se rassembler à cet endroit, abrités des regards (sauf du mien qu’ils ne soupçonnent pas), pour fumer, téléphoner, s’amuser, bavarder, déjeuner, attendre le cours suivant. Des jeunes du lycée voisin ou de l’école de danse à une encablure de là.
D’ordinaire ils évoluent en grappe, c’est pour cela que je l’ai remarquée, elle. Seule. Sans téléphone, sans livre ni sandwich. Juste elle et ses pensées.

Un rictus. Un mouvement de la tête. Je n’ai entendu ni aperçu le sanglot et le nez qui renifle mais ils y étaient, j’en suis certaine.
Elle a relâché le  cou comme si le fil invisible qui tenait droit son buste venait de rompre. J’ai craint un instant que le poids de sa tête entraîne tout son corps avec elle, qu’elle s’enroule comme une feuille brûlée par le soleil. Il n’en est rien.

Elle ferme les yeux, prend une longue inspiration. Alors je vois une larme rouler sur sa joue. Tout son visage se crispe. Et d’autres larmes suivent qu’elle essuie d’un revers de manche.

Quel malheur la frappe ?

Impossible à imaginer tant il y en a d’envisageables, de ces pépins qui s’abattent sur chaque vie. Certains tuent, d’autres assomment ou juste affaiblissent. On s’en remet plus ou moins bien, plus ou moins vite. Parfois on en évite un, on se dit qu’on a de la chance, ou l’on trouve ça normal, mais un autre arrivera inévitablement. La vie est ainsi, constituée de dépressions et de sommets, elle est rarement un plat pays.

Qu’est-ce qui peut bien bouleverser cette jeune fille ?

Des amours impossibles, une amitié bafouée, un avenir compromis, un deuil récent… J’abandonne ma fenêtre, impuissante et troublée.

Et quand je reviens, quelques minutes plus tard, elle n’est plus là. Partie dans sa tristesse vers un bonheur à venir.

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vagues sur la plage

Laisser venir l’inspiration

Ecouter le grondement du ressac assise sur un rocher et penser à son roman. Laisser les idées affluer comme les vagues, en conserver certaines, laisser les autres repartir au large. Un exercice que j’affectionne.

J’ai été marquée par les confidences de Joël Dicker lors d’une émission de télé récente. Il y a affirmé écrire sans avoir de plan, se laisser porter par son imagination, une idée en entrainant une autre, pour aboutir à plusieurs versions de son récit qu’il sauvegarde soigneusement ne sachant celle qu’il va retenir.

Alors que dans les ateliers d’écriture, on nous parle plan, chapitres, découpage, j’ai jusque-là été incapable de m’y tenir. Aucun de mes quatre romans, si j’inclus celui en cours, ne s’est sagement tenu à l’intrigue initiale. Des personnages s’y sont invités, des rebondissements sont apparus et la fin en a été modifiée, voire tout le roman a été chamboulé. Ce désordre me chagrinait, je dois dire, mais si le talentueux Joël Dicker s’y laisse aller également, je ne peux que me sentir un peu plus rassurée.

Pour reprendre la formule de Marianne Jaeglé, il y a les écrivains architectes qui construisent soigneusement leur œuvre et les écrivains jardiniers qui sèment et attendent de voir ce qui pousse. Je vais continuer de semer.

Le hall de la gare d'Austerlitz

L’homme de la gare

Je prends souvent le train Gare d’Austerlitz pour me rendre à Cahors, toujours le même, celui de 6h et quelque.

Il me faut une vraie bonne raison de le prendre ce train – rendre visite à ma mère – pour endurer ce parcours matinal. Lever peu après 5h, quelques stations de RER ou de métro jusqu’à la gare de Lyon, traversée à pied du pont Charles de Gaulles en trainant ma petite valise à roulettes.

C’est certainement le moment que je préfère, ma récompense, découvrir Paris depuis la Seine au petit matin, avec ses péniches amarrées, ses lumières ou le jour naissant selon la saison. Sous la pluie, le vent, la neige ou dans la douceur estivale, c’est toujours un régal.

Au bout du pont, la gare d’Austerlitz, enfin.

Quand j’ai le temps, comme lors de mon dernier voyage, je m’arrête acheter de quoi me restaurer au premier kiosque déjà ouvert. C’est là que j’ai aperçu un homme, agacé, agité, allant de personne en personne en tenant haut un billet à la main. Il s’est approché du stand de viennoiseries pendant que la vendeuse me servait.

Dans le train, j’en ai écrit cette histoire et mon trajet a pris fin sans que j’aie vu le temps passer.   

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L’homme de la gare

6h du matin, la Gare d’Austerlitz parait agitée, comme si elle n’avait pas fermé l’œil.

Tandis que je règle mon pain au chocolat, un homme s’approche des deux jeunes clientes qui m’ont précédée en agitant un billet de cinquante euros. Elles secouent la tête, lui suggèrent de s’adresser à la caissière de la petite boutique. Il cherche son attention, son billet bien en vue, sans rien en attendre, cela se voit, peut-être a-t-il déjà tenté sa chance auprès d’elle. Elle lui lance un regard mauvais, un geste à peine esquissé comme s’il s’agissait de chasser une mouche qui se serait déjà envolée. Peut-être redoute-t-elle tout simplement qu’il effraie ses clients. Il maugrée.

Billet, distributeur, c’est tout ce que je comprends. L’Africain, d’origine du moins, parle mal le français. Je l’appelle, Monsieur, de quoi avez-vous besoin ? Il se tourne vers moi, son papier-monnaie orange toujours au bout des doigts. Je le sens fébrile et ne suis pas franchement rassurée. Je n’aime pas les gares, je m’y sens perdue, j’ai peur des gens que j’y croise comme s’ils n’étaient pas de mon monde.

L’homme ne me répond pas ou je ne m’en souviens plus. Je lui dis, je vais regarder, je ne vous garantis rien, et ressors mon porte-monnaie de mon sac avec précaution, en m’y agrippant. J’ai retiré la veille cent euros en petites coupures à la banque, j’ai ce qu’il faut, je le sais. Viennoiserie dans la main gauche, porte-monnaie dans la droite, je peine à en extraire deux billets de vingt euros et un de dix sous le regard tourmenté de l’homme. Il s’en empare tout en me remettant son dû. En sentant contre la pulpe de mes doigts la raideur d’un papier neuf, l’idée d’un faux billet m’effleure. Je suis en train de me faire arnaquer, c’est la police que l’homme craint. 

Il s’est déjà éloigné de quelques mètres, j’ignore s’il m’a même remercié, agitant le billet de dix euros sous le nez du marchand de macarons. Qui lui aussi le rabroue. Il se retourne, les épaules basses, vers la grande salle à la recherche d’un soutien, de quelqu’un à qui s’adresser, tout en tenant bien en évidence sa petite fortune. Je le trouve bien imprudent. J’ai repris mon chemin vers la voie, nos regards se croisent. Le sien est triste. Il réfrène un mouvement vers moi en me reconnaissant, j’ai envie d’aller vers lui à nouveau, de lui demander de combien de monnaie il aurait besoin, mais je l’ai déjà dépassé et ne me retourne pas.

Quelques mètres plus loin, à l’abri d’un recoin, j’ouvre mon porte-monnaie pour vérifier le billet qu’il m’a donné. Avers, revers. Je n’y connais pas grand-chose mais il semble authentique.

En montant dans le train, un regret me saisit, celui de ne pas avoir pris plus de temps avec cet homme. La peur, communicative, m’a encore trompée. Je suis idiote.

Idiote ou toujours aussi naïve. Je saurai lors d’un prochain achat si le billet est officiel, mais les motivations de l’homme je ne les connaitrai jamais. 

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montage meuble

La commode en kit

Monter un meuble en kit, on en a tous fait l’expérience, c’est galère ! Et ce n’est pas Gad Elmaleh qui nous dira le contraire. On a tous ri devant son sketch IKEA parce qu’évidemment on s’y reconnait. “Tu la connais cette pièce qui te reste à la fin ?”. On les connait bien en effet ces pièces qu’on garde précieusement pour ne rien en faire. 😂

Durant les confinements successifs, comme vous certainement, j’ai rangé, réparé, remplacé, j’en ai parlé, mais aussi acheté un meuble destiné à améliorer les conditions de télétravail. Les difficultés de montage, et pourtant il ne venait pas d’Ikea, et la promiscuité familiale m’ont inspiré cette histoire. 

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La commode

On l’a choisi ensemble cette armoire et enfin elle est là ! Enfin, c’est plutôt moi qui ai passé des heures sur Internet à chercher le meuble qui convient. Ni trop grand ni trop petit, assez profond mais pas trop, blanc comme les autres meubles de la pièce, de bonne facture à ce qu’il parait, fabriqué en UE, ça on y tient tous – je veux dire mon mari aussi –, et pas trop cher. Bref la perle rare !

— Chéri, elle t’irait celle-là ? Tu pourrais y ranger toutes les affaires que tu as rapportées pour télétravailler, hein ?
Coup
d’œil du chéri qui regarde un match de foot.
— Blanc, t’es sûre ? 
— Ben
 oui, comme le bureau.
— D’accord alors.

Pas embêtant le mari. Un clic pour mettre l’article dans le panier. Y’a plus qu’à dégainer la carte bleue, passer les deux barrières de sécurité de la banque – où c’est que j’ai mis mon mobile, m… pour récupérer le code ? – et attendre que la merveille arrive. Soulagement. Une bonne chose de faite.

Avoir choisi c’est le premier pas, un pas capital qui amorce le processus. On va enfin pouvoir remplacer l’immonde commode offerte par tante Louise il y a plus de vingt ans, déjà bancale à l’époque c’est dire, ne plus devoir recoller régulièrement les fonds de tiroirs qui s’affaissent et ne plus avoir tout simplement cette horreur dans son champ de vision ! Elle a bien servie, nous a rendu service quand on était fauchés, mais il est temps de passer à un meuble fonctionnel et moderne. Dans quelques jours une petite armoire aussi neuve qu’immaculée viendra la remplacer.

Que faire de la commode ? Essaie de la donner via l’un de tes sites, propose Chéri. Par l’un de tes sites, il veut parler de Freecycle, de Geev et d’un groupe Facebook dédié aux dons dans notre ville. Il en sait quelque chose, je le mets parfois à contribution pour aller remettre un objet ou en récupérer un.

— Va devant le café de la place à 11h, le gars s’appelle Ludovic et il portera une parka jaune. Je l’ai prévenu que c’est toi qui viendras au rendez-vous.
— Et je fais quoi ?
— Tu lui dis bonjour, tu lui fais un sourire, tu lui remets le sac et tu lui dis au revoir. C’est dans tes cordes ?
— C’est malin !

Pour ne pas prendre le risque d’être encombré par le vieux meuble trop longtemps, pour laisser place à des travaux de peinture dans un mois, commandé avec l’accord de Chéri évidemment, je prends rendez-vous en ligne avec le service des encombrants. J’en étais sûre, trois semaines de délai !

— Qu’est-ce qui est sûr ? demande Chéri.
— Ça va aller, je réponds. Les encombrants emporteront la commode juste avant l’arrivée du peintre si je n’ai pas trouvé à la donner rapidement. Et si je trouve preneur, je décommanderai le service.
— Ce serait mieux de la donner, dit Chéri, que de le jeter.

Une semaine plus tard, le livreur sonne.

— Troisième étage ! je clame dans l’interphone.
— Vous pouvez pas descendre ? il répond. Je ne monte pas les paquets à l’étage et si vous pouvez vous faire aider, ce serait mieux, y’a deux paquets très lourds.

Chéri est au bureau, je n’ai aucun être vivant sous la main, pas même pas un poisson rouge. Peut-être un voisin qui aura la bonne idée de se pointer dans le hall à cet instant là justement…

Les deux colis sont aussi énormes que lourds ! Le livreur consent à les tracter jusqu’au hall de l’immeuble plutôt que de les abandonner sur le trottoir, c’est déjà ça. Un coup d’œil à leur intégrité, pas de pet semble-t-il. Je signe le bon de livraison et respire un grand coup. Allez ma vieille un peu de punch ! Evidemment pas un voisin ne songe à prendre l’air à ce moment là…

L’un après l’autre je pousse les deux pachydermes jusqu’à l’ascenseur, les ressors sur le palier et les pousse à nouveau jusqu’à notre appartement. Au niveau de la barre de seuil, ça bloque comme toujours. Il faut faire contre poids pour la passer, j’ai l’habitude.

— C’est quoi ces cartons ? s’étonne Chéri en découvrant les deux mastodontes à son retour du boulot. Ah oui ! Tu l’as commandée alors.
— C’est bien ce qu’on avait décidé, non ? Y’a plus qu’à la monter.

Trois jours à me narguer, les deux baleines. Le dimanche, en début d’après-midi, je me décide. Allez courage !

Surprise en ouvrant le plus gros carton, des pièces, des pièces et encore des pièces ! My God, un puzzle de 1000 pièces en 3D. Un coup d’œil à la commande – quatre tiroirs et deux portes, rien que de plus normal – et un autre à la notice : dix-huit pages de schémas ésotériques. Aïe, aïe, aïe.

Je bavais, petite, devant les Mécano (réservés à l’époque aux garçons), il n’est jamais trop tard pour réaliser ses rêves.

Un peu de méthode, que diable ! Je dispose au fur et à mesure du déballage, les petites pièces sur un plateau, les grosses en métal dans un coin et les planches dans un autre. Mince, l’une des planches est abîmée. Deux grosses écailles de bois viennent enlaidir la surface blanche. Nouvel appel à la notice. Il doit s’agir du plateau supérieur. Pas de chance.

Vérification du second colis. Il s’agit des portes vitrées. De ce côté-là, tout va bien.

— Chéri, qu’est-ce que tu en penses, on tente le coup, ça se verra peut-être pas, ou je le signale ?
— On le signale. Si on peut se faire rembourser, c’est mieux.
— Et après ?
— Après… tant pis. T’as vu tout ce bazar ? Tu peux pas me demander de monter ce truc-là.
— Je ne t’ai jamais rien demandé de tel. Au mieux, tu m’aides, comme tu dis.

Il abuse le Chéri ! Je fais la tête mais il ne s’en rend même pas compte, perdu qu’il est dans ses tableaux Excel.

Le lendemain matin, j’inspire un bon coup en saisissant mon téléphone. Depuis dix minutes, j’agite mes neurones en tentant de faire remonter à la surface quelques bribes d’allemand.

— Hallo, ich habe meine Bestellung erhalten, aber…
— Que puis-je faire pour vous ?

À peine l’ombre d’un accent germanique. Réponse en deux secondes chrono dans un français quasi-parfait. Stupéfiants ces Allemands !

Ils me renvoient la pièce défectueuse. Une heure à remettre toutes les pièces dans le carton, un vrai jeu de Tétris ! Voilà pourquoi il pèse une tonne le colis, il n’y a pas un centimètre cube d’air à l’intérieur !

Deux jours plus tard, le livreur (le même) sonne.

— Vous pouvez descendre ? C’est un peu lourd.
— Comment ça lourd ? C’est juste une planche.
— Non, c’est un gros colis.

Un gros colis en effet, exactement le même que le précédent, le plus lourd. Tout aussi difficile à pousser jusqu’à l’ascenseur. Pas très écolos les teutons !

Tout le restant de la semaine, je lorgne vers les cartons. Cette fois-ci pas d’échappatoire.

— Tu t’es pas fait rembourser finalement ? tente Chéri.
— Ben non, on la veut cette armoire ou on la veut pas ?

Dimanche matin. Certains se poussent du col pour faire du sport, d’autres pour aller chez la vieille tante et moi pour monter un meuble. Chéri ne peut pas m’aider, il a des dossiers en retard.

Rebelote. La quincaillerie sur le plateau. Jamais vu autant de bouts de ferraille différents ! Les planches dans le coin, les parties de piètement dans l’autre. Un grand carton étalé au centre et c’est parti ! La notice s’apprivoise plus facilement que redouté, je dois reconnaitre que ses schémas fort détaillés compensent bien la complexité du montage. Tout le contraire des kits Ikea !

Deux heures plus tard, la structure est montée. Manque plus que les tiroirs et les portes.

— Pas mal, finalement, commente Chéri qui lève la tête de son ordi. T’as prévu un truc pour le déjeuner ?

En milieu d’après-midi, l’armoire est prête. Je la contemple quelques instants fièrement.

— T’as vu ? Nickel pour ranger tes affaires.
— Pas mal. On va pas l’installer maintenant ?

Le ton est inquiet.

— Non, pas avant de s’être débarrassé de la commode. On la déposera aux encombrants mercredi si je ne parviens pas à la donner d’ici là. Tu m’aideras ?
— Comme toujours, répond-il avec un sourire charmeur.

Encore une grosse demi-heure à trier les pièces restantes. Avec une armoire (même sans portes) en plus, je n’en manque pas. Les planches empilées contre un mur avec les grosses pièces métalliques en attente des encombrants, les petites dans le bac du recyclage, les vis qui peuvent servir dans la mallette à outils. Les cartons dûment aplatis et liés déposés dans le local à poubelles. Ouf ! On peut sortir, chéri !

Mercredi soir, Chéri rentre tardivement du travail. Ça me donne le temps de vider tranquillement les tiroirs de la commode dans deux cartons récupérés au marché le week-end précédent.

— Tu m’aides à descendre la commode sur le trottoir ?
— T’as pas réussi à le donner ?
— Non, trop décatie.
— C’est dommage. Y’a des tas de gens qui ne savent pas où ranger leurs affaires, ne serait-ce que dans un garage. T’as tout essayé ?

Il n’insiste pas. Il a capté mon regard agacé.

La commode ne passe pas dans l’ascenseur.

— Ne me dis pas qu’il faut la démonter ? s’irrite Chéri. On l’y a bien fait entrer à l’époque pour la monter jusqu’à chez nous.

Mais rien à faire.

Heureusement Dieu est avec nous. Les montants cèdent à peine tentons-nous de basculer le meuble pour chercher comment procéder. Quand je le disais branlant…

Deux allers-retours en ascenseur et la commode trône sur le trottoir. Il ne manque plus qu’à y ajouter les planches et grosses ferrailles en excédent. Chéri s’impatiente, je le sens. Il doit avoir des trucs à faire.

En scotchant en haut de l’amoncellement l’étiquette portant la référence de l’enlèvement, je suis fière.

— Une affaire qui roule !
— Super organisation, bravo.

Il est reconnaissant le Chéri.

— Il nous reste à mettre la nouvelle armoire à sa place, j’ajoute.

Regard noir de Chéri. Je sens comme un coup de vent qui envoie au loin la reconnaissance à peine exprimée.

Un dernier effort et le meuble est en place.

— Tu seras bien là pour travailler, hein ?
— Oui c’est vrai. On a bien fait d’insister.
— Je remets tout dans les tiroirs et on dîne, d’accord ?
— OK, j’appelle ma mère en attendant.

Le lendemain en rentrant du travail, je remarque les planches sur le trottoir. Toutes les planches, les ferrailles aussi. Ainsi qu’un gros meuble et un long miroir. La commode est partie, l’étiquette aussi. Qu’est-ce qu’il s’est passé ? J’avais pourtant bien déclaré tout ce fatras lors de la demande d’enlèvement.

Soit il y a eu une erreur dans la prestation, soit la personne qui a déposé le meuble en a déposé un autre que les exécutants ont privilégié par rapport aux planches, soit le dépôt du miroir a été rédhibitoire, soit quelqu’un a emporté la commode et l’étiquette avant l’enlèvement, soit le mètre-cube déclaré a été dépassé à cause du dépôt additionnel… je n’aurais jamais la réponse. Et quoi qu’il en soit, je ne peux laisser ce bazar sur la voie publique.

Mon manteau encore sur le dos, je prends à nouveau rendez-vous avec les encombrants. Mince trois semaines de plus !

Chéri est en déplacement. Je vais chercher un diable, charge tout le rebus et le descends à la cave en trois allers-retours. J’ai mal au dos. Des courbatures dues au montage de la commode certainement.

Trois semaines plus tard, la veille du passage des encombrants, je sollicite Chéri.

— Tu viens m’aider à remonter les planches de la cave ?
— C’est quoi ça encore ?
— Je t’ai raconté, les planches qui n’ont pas été emportées.
— Ah oui, t’en est encore là ?
— Eh oui ! Je ne suis pas magicienne comme toi. Quand je claque des doigts, il ne se passe rien avec moi. Tu n’as pas conscience de la chance que tu as d’avoir ce don, Chéri !

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Il s’agit d’une fiction, on est bien d’accord ?

Toute similitude avec des faits ou des personnages existants ou ayant existé serait une pure coïncidence. Mon chéri n’est pas du tout comme ça, il adore les puzzles de meuble et moi je le regarde manier le tournevis en sifflotant tandis que je bois mon thé.😂😂😂 

Les meubles en kit et vous, ça donne quoi ? Témoignez en commentaire pour nous faire rire… ou nous rendre jaloux !

(Illustration reprise du site « Lulu dans ma rue« )

Personne en situation de handicap

Etre beau

« Le beauté ne s’arrête pas à quelques différences ». C’est ce que nous donnent à voir et lire les deux auteures de cette belle expo intitulée « Etre beau » qui m’a profondément touchée. Pendant trois ans, la photographe Astrid di Crollalanza et l’écrivaine Frédérique Deghelt ont photographié et donné la parole à des personnes en situation de handicap. Résultat : de magnifiques clichés accompagnés de textes émouvants qui interrogent sur la différence, la normalité, la beauté, l’estime de soi, le regard des autres.

L’exposition, qui compte plusieurs dizaines de panneaux, est actuellement (mars 2022) proposée aux passants sur la place devant la station de RER de Vincennes (94).

personne qui lance un coup de gueule

Liberté d’expression

Vous connaissez mon admiration pour JK Rowling, j’en ai parlé et reparlé. Et si je l’ai choisie comme personnage (masqué) de mon roman Merci Gary, un personnage secondaire mais décisif dans l’intrigue, ce n’est évidemment pas par hasard.  Jenna R. King, la généreuse amie de Claire, est Joanne K. Rowling, mes lecteurs et lectrices l’ont compris.

Diktat de la bien pensance

Alors quand elle se fait clouer au pilori pour ses propos jugés transphobes, je me sens attaquée en tant qu’auteure et groupie de l’auteure. Je n’ai pourtant l’intention ni d’analyser, ni de défendre ni même de condamner ses paroles, je veux juste qu’on la laisse tranquille, qu’on la laisse s’exprimer. Ce n’est pas parce qu’elle est un porte-parole extraordinaire pour la jeunesse qu’il faut la museler, lui dicter ses pensées. Eduquer c’est amener les jeunes à penser par eux-mêmes pas les endoctriner. Elle est, et reste, une fabuleuse romancière.

Quant le New-York Times s’en mêle, c’est la catastrophe !

Quand au nom de la bien pensance, les maisons d’édition américaines emploient des Sensitivity readers (lecteur en sensibilité) pour expurger les textes littéraires de tous les éléments qui pourraient être qualifiés de transphobie, homophobie, sexisme, atteinte aux religions, c’est pire que tout !

Liberté d’expression dans la littérature

J’ai partagé ces derniers jours sur les réseaux sociaux le Coup de gueule de Jérôme Vialleton. Je lui ai aussi piqué son illustration. Et je ne peux que, comme lui, rappeler combien la liberté d’expression, dans la littérature plus qu’ailleurs, est primordiale. Il reste à espérer que cette chasse aux sorcières ne trouvera pas d’écho en Europe.

 

Smiley

Le temps de sourire

Smiley a 50 ans !

Je viens d’apprendre qu’il est né en 1972, qu’il a été utilisé pour la première fois le 1er janvier de cette année-là par le journaliste Franklin Loufrani dans le journal France-Soir.  Il s’agissait pour lui de mettre en avant des récits qui remontaient le moral des Français. Cette opération, baptisée «Prenez le temps de sourire », fut un succès immédiat (Quelle bonne idée ! Dans la morosité actuelle, il faudrait en relancer une très vite !).

Je me souviens surtout comme on s’est emparé dans les années 70 de cette tête ronde, jaune et souriante. Année après année, on l’a vue se décliner en différentes couleurs, avec des mimiques drôles et moins drôles, être détournée, parfois maltraitée, virer à l’émoticône. Mais Smiley est resté, sans jamais passer de mode, sans prendre une ride (il a bien de la chance !).

Un copain de toujours

Smiley est pour moi comme un copain d’enfance, un copain un peu plus jeune à la bonne humeur communicative, et toujours présent dans ma vie sous une forme ou une autre. J’en ai eu des tee-shirts à l’effigie du joyeux luron, des trousses, des porte-clés, des carnets et même un ordi. La preuve, je viens de retrouver cette photo dans une chronique de 2018.

J’ai changé d’ordi depuis mais je vais vous avouer quelque chose, sans chercher bien loin dans mes tiroirs, je peux vous montrer un tee-shirt, un sweat, un porte-clé, des chaussettes avec sa mimique dessus. Je l’ai dessiné, peint, brodé… c’est facile, vous me direz, un cercle, deux yeux, une bouche, pas besoin d’être Van Gogh. Quatre traits pour faire naître un sourire. Et sourire en retour. « Use your smile to change the world, but don’t let the world change your smile. » 50 ans que je craque !

Le temps de Smiler

Il est toujours temps de sourire, il est même plus que jamais ce temps-là, et plus seulement qu’avec les yeux. Les masques sont en train de tomber, profitons-en ! Alors, sans attendre je vais porter mon sweat, me rendre aux galeries Lafayette qui organisent un évènement en l’honneur de mon ami de 50 ans et sourire avec lui !

Take the time to smile – Prenons le temps de sourire !

Vous avez certainement vous-aussi vos Smiley préférés. N’hésitez pas à m’envoyer des photos !

feu de cheminée

Petit éloge du feu de bois

Un bon feu dans la cheminée, mon bonheur campagnard !

Quand je me rends chez ma mère entre octobre et mars, allumer le feu dans la cheminée est un rituel. Dans mon appartement, je n’ai pas cette possibilité-là et ça me manque !
Le feu qui crépite dans l’âtre est mon bonbon d’hiver. Avec son goût sucré qui s’installe sur la langue et dans les souvenirs.
Le plaisir commence par les quelques pas jusqu’au bûcher souvent dans un froid ardent. La morsure du gel avant celle du chaud. Tout le contraire du salutaire sauna que je laisse aux nordistes.
Il  convient de bien choisir ses bûches, ni trop épaisses ni trop fines, en évaluant la durée de la flambée.
Les bras chargés des bûches et de petit bois, on regagne la maison en laissant derrière soi une trainée de débris. Le gros pull qu’on a sur le dos sera à secouer lui-aussi. Le bois mort est friable, sa copine, la balayette, n’est jamais bien loin
Puis vint l’installation du bois dans la cheminée, tout un art. Un lit de papier journal et de branchages, deux bûches en V reposant sur les chenets. Chacun y va de son conseil, la soirée commence !
Enfin la tête de l’allumette qu’on frotte contre la boîte. Le papier s’enflamme. Quelques minutes à regarder le feu naître. Attentifs. Comment va t-il se comporter ? Un réajustement des bûches parfois. Quelques coups de soufflet. Le bufadou, on l’appelle en occitan.
On surveille, on jauge, on apprécie, la naissance des braises, la hauteur, la couleur, la vaillance des flammes. Certains feux se la coulent douce, d’autres sont gaillards, certains hésitants. Tout un spectacle ! On en parle, on l’entretient, on l’asticote, le feu est comme un jeune enfant, il ne peut laisser indifférent. Et la soirée file au coin du feu.

Un plaisir sensuel et plus encore

Le feu active tous nos sens. La lueur, les craquements, l’odeur, la chaleur et même le plaisir des papilles quand on y fait rôtir une châtaigne, un chamallow, un quartier d’agrume.
Il invite à discuter, à échanger, à lire… et à bouger. Vous en connaissez, vous, des feux avec télécommande ?
En somme, il nous épargne la télé et ses abêtissants programmes.

En voie de disparition

Du bien, il en fait, à l’âme, au corps, au cœur, c’est indéniable. On pourrait le considérer à recommander, à ajouter à sa liste des attitudes forme, entre les 5 fruits et légumes et les 10 000 pas quotidiens. Mais non !
Selon le ministère de la Transition écologique, un feu de bois de deux heures dans une cheminée à l’ancienne recracherait autant de particules fines qu’un vieux diesel lors d’un aller-retour Lille-Perpignan. Alerte pollution !
Equiper la cheminée d’un insert, d’un feu factice, la remplacer par un poêle à bois… il y a bien sûr des solutions plus écologiques. Sans odeur ni saveur. Des bonbons d’hiver au goût et à la couleur synthétiques.
Mon feu de joie d’hiver va disparaitre. L’allumer me pince désormais le cœur. Je pense au camion diesel, à la cheminée qui, un jour, s’affaissera sous les coups de marteau. Et je me love tout près de lui comme mes aïeuls autrefois dans le cantou, attendant, les prunelles enflammées et les joues cramoisies, parlant peu, que l’heure du coucher vienne les tirer de cette douce léthargie.

 

 

 

 

 

lettre

L’homme de la gare vous attend

lettrePour découvrir en avant-première, L’homme de la gare, un court récit, inscrivez-vous immédiatement à ma newsletter !

Bug, bug, bug

C’aurait pu être le refrain d’une chanson, c’est malheureusement ce qui m’est arrivé dans mes tentatives éditoriales en ligne. Ca n’a pas arrêté de buguer et rebuguer. Ca a bogué et rebogué, devrais-je peut-être écrire.

Ces derniers jours, j’avais l’impression de danser au rythme du refrain. Un pas en avant, bug, un pas en arrière. Un pas en avant, bug, un pas en arrière. Je faisais du surplace. En musique, bug, bug, bug*, dans une danse forcée.

Des extensions nécessaires impossibles à installer, des fenêtres qui valsaient, un éditeur de texte cabotin… j’ai bien failli jeter l’ordi par la fenêtre. Heureusement, mon geek préféré, Jérôme, est toujours là pour me venir en aide. Il a reconnu que je n’avais pas de chance sur ce coup-là, que des bugs, j’en avais plus que mon lot.

Mais sa cape de super héros du Net restait insuffisante contre l’adversité. Il séchait lui aussi et je restais incapable de m’adresser à mes lecteurs privilégiés. Il a fallu mettre sur l’affaire l’éditeur du logiciel lui-même. Après quelques jours d’attente et deux ou trois allers-retours, le bug a été résolu. Je ne vous dis pas quel était le problème, je n’ai rien compris.

L’homme  de la gare  en avant-première

Allez hop, c’est le nouveau refrain. Beaucoup plus joyeux. L’homme de la gare est le titre de la micro-nouvelle écrite à votre attention. Il ne me reste plus qu’à l’adresser à ceux et celles qui la souhaitent avec ma toute première newsletter. Je suis impatiente.

Juste un petit problème

Le truc pas cool, c’est que j’ai perdu dans le trou noir numérique les adresses mail des personnes qui se sont inscrites avant mardi dernier. Si c’est votre cas, SVP, veuillez vous  réinscrire. Je suis désolée !

Je vous attends. A très vite !

* Cette double répétition me rappelle le titre de l’une de mes anciennes nouvelles, Bise, bise, bise. Vous vous en souvenez ? Pour ceux et celle qui veulent la retrouver, c’est par là.

Illustration Pixabay