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Autres lectures

Autres lectures durant ma pause forcée, ces deux romans « feelgood ».

Le dernier opus de Grégoire Delacourt d’abord, dont j’apprécie le style et le regard humaniste. Il y est question des gilets jaunes, d’autisme, de radicalisme religieux, de désespérance, de violence, d’impuissance… et surtout de rêves, d’amour et d’espoir. L’auteur s’emballe, c’est son style, il veut croire en une société plus juste, plus accueillante, que l’intelligence et la bienveillance gagneront. Un récit vibrant qui m’a emportée vers un monde méilleur.

Celui de Julien Sandrel ensuite, « la vie qui m’attendait », emprunté à ma mère à la veille de mon intervention chirurgicale, le titre certainement !, qui s’est révélé une belle surprise. A quarante ans, Romane découvre qu’elle a une soeur jumelle, Juliette. Comment est-ce possible ? Si les deux soeurs se ressemblent trait pour trait, leurs vies sont bien différéntes. Une réflexion sur la valeur de l’existence, sur la quête du bonheur et le courage de changer de vie.

Deux romans tendres et optimistes pour quelques heures de lecture apaisantes.

Une bien belle journée

Il n’est pas 5 h quand je m’extrais de mon lit. Migraine.

Dehors, il fait nuit. Pluie à verse.

La grille du métro est fermée. Panne du mécanisme, m’expliquent les deux agents qui s’escriment à la relever.

Je cours jusqu’à l’accès suivant. La pluie redouble.

Je m’égoutte sur le quai, les lunettes embuées, en attendant la rame.

À la station Gare de Lyon, l’escalier roulant est HS. Plutôt que d’en chercher un autre plus vaillant, qui sait ?, je saisis la poignée de ma valise et m’attaque à la longue volée de marches avec l’entrain d’un alpiniste en début d’ascension.

Au-dessus de la Seine, en plein milieu du Pont d’Austerlitz, une des deux roulettes de ma valise lâche. Il faut dire que la roulante n’est pas jeune.

Je la tire tant bien que mal, comme on remorquerait un avion posé sur un demi train d’atterrissage.  

Je monte dans le train trois minutes avant que le sifflet du départ retentisse. Ma montre ne va tarder à annoncer 6h.

Au fil des années, l’heure de ce premier train de la journée à destination de Toulouse via Limoges avance inexorablement, tandis que l’heure d’arrivée stagne. Il vaut mieux sans hésitation se rendre à Bordeaux qui se rapproche de Paris, elle, d’année en année. Mais c’est à Cahors que vit ma mère…

Tandis que le train s’ébranle, je change mon masque, déjà humide. Pose mes lunettes à cheval sur ma cuisse afin qu’elles sèchent elles-aussi. Et je somnole.

Je vais chercher un café un peu plus tard. Regagne ma place. Attrape un livre au fond de mon sac à dos, par habitude car je suis bien incapable de lire tandis que ma tête tambourine, ôte mon masque pour siroter le nectar fumant. Mes lunettes ne sont plus sur mon nez. Damned !

Je me lève brusquement craignant de m’être assise dessus – ça m’est déjà arrivée voyez-vous, renverse une partie de mon café sur mon jeans – il était mouillé, il le reste ; il était bleu, il se charge de marron ; il était frais, il devient chaud, mais pas au point de me brûler la peau, c’est déjà ça. La question des lunettes est la seule qui me préoccupe de toute façon à cet instant-là.

L’examen de mon siège ne révèle rien qui évoquerait de loin ou des près des prothèses d’œil, Mais où sont-elles passées que diable ? Quand mon regard balaie l’allée, remontant virtuellement le chemin accompli avant de me rasseoir, je les voie à quelque deux mètres de moi – vous remarquerez que je me débrouille sans elles, mais c’est quand même mieux avec ! – alanguies sur la moquette gris chiné.  Intactes. Pas piétinées, même pas bousculées. Un miracle.

Dans deux heures le jour se lèvera sur une bien belle journée.